La Bolivie traverse un moment politique crucial. Le premier tour des élections présidentielles marque un tournant historique. Après vingt ans de pouvoir, la gauche cède du terrain. Deux candidats de droite s’affronteront, promettant de redessiner l’avenir économique de ce pays andin de 11,3 millions d’habitants.
⚡ Pas assez de temps ? Un résumé vite fait !
- 🗳️ Le sénateur Rodrigo Paz a créé la surprise, arrivant en tête contre toute attente.
- 📉 Le Mouvement vers le socialisme (MAS) a subi une déroute électorale historique.
- 🤝 Le second tour opposera deux figures de droite, marquant un virage idéologique.
- 💸 Le futur président devra gérer une crise économique et des réformes impopulaires.
La surprise Rodrigo Paz
Le candidat de centre-droit, Rodrigo Paz, a déjoué tous les pronostics. Aucun sondage ne prévoyait sa qualification pour le second tour. Pourtant, ce sénateur chrétien-démocrate de 57 ans est arrivé en tête. Il a recueilli 32,1% des voix selon un premier décompte officiel.
Il devance ainsi un favori, l’ancien président de droite Jorge « Tuto » Quiroga, qui a obtenu 26,8%. Son discours est perçu comme plus modéré. Il répond à une forte demande de renouvellement politique.
« Il ne représente ni les grandes entreprises, ni les libéraux radicaux. Il incarne le citoyen ordinaire », analyse le sociologue Renzo Abruzzese sur la chaîne Red Uno.
Loin d’être un novice, Rodrigo Paz possède une solide trajectoire politique. Il fut conseiller municipal, maire, puis sénateur de Tarija, sa région natale. Son projet de « capitalisme pour tous » a séduit un électorat de gauche désabusé.
Le naufrage de la gauche
L’inaction du gouvernement face à une crise économique a épuisé la patience populaire. Le pays fait face à une pénurie de devises étrangères et de carburant. L’inflation annuelle frôle les 25%, observe le politologue Daniel Valverde pour l’AFP.
Le gouvernement du président sortant Luis Arce a puisé dans les réserves de dollars. Ces fonds ont servi à maintenir un coûteux système de subventions aux carburants. De plus, une lutte de pouvoir interne a affaibli le parti. L’ancien président Evo Morales (2006-2019) et son successeur se sont affrontés pour le contrôle du Mouvement vers le socialisme (MAS).
Résultat, la gauche est sortie exsangue du premier tour. Eduardo del Castillo, le candidat du MAS, n’a obtenu que 3,1% des voix. Le président du Sénat, Andronico Rodriguez, a recueilli 8,2%.
Selon Gustavo Flores-Macias, chercheur à l’université américaine de Cornell, la gauche doit mener une « profonde introspection » pour mesurer « les terribles dommages infligés à ses chances de gagner, mais aussi à la crédibilité du gouvernement Arce ».
Un duel à droite inédit
Rodrigo Paz et Jorge Quiroga partagent plusieurs mesures communes. Ils proposent la fin des subventions aux carburants. Ils prônent une réduction de la pression fiscale. Ils souhaitent aussi une rupture avec le modèle étatiste.
Cependant, leurs styles de campagne ont fortement divergé. Paz « n’a pas perdu de temps ni d’énergie à dénigrer, insulter ou rabaisser » quiconque dans les débats, souligne Daniel Valverde. Quiroga, à l’inverse, s’est illustré par des passes d’armes virulentes. Il a notamment ciblé l’influent homme d’affaires Samuel Doria Medina, longtemps perçu comme son principal rival.
Quel que soit le vainqueur le 19 octobre, il devra gouverner avec un Parlement dominé par la droite. Néanmoins, il ne disposera pas d’une majorité claire. Cette « fragmentation compliquera la tâche du futur président », prévient Gustavo Flores-Macias.
Le coût des réformes à venir
Le prochain président sera confronté à un défi majeur. Il devra appliquer les coupes budgétaires promises. Cela s’annonce difficile dans un pays habitué aux subventions et programmes sociaux. La population dépend largement de ces aides.
« Supprimer les aides, réparer les déséquilibres… tout cela est facile à promettre », analyse le chercheur de l’université Cornell. « Mais la vraie difficulté, pour l’un comme pour l’autre candidat, sera de le faire sans frapper de plein fouet la population. »
Selon lui, la volonté de changement exprimée dans les urnes pourrait offrir une courte période de grâce. Cela permettrait au futur chef de l’État d’introduire des mesures d’austérité graduelles. Il pourrait ensuite imposer des réformes plus profondes.
